« Il n’y aura pas une prison de plus ici », disent d’une même voix des groupes communautaires à propos de la décision d’Ottawa de confier le contrat d’entrepreneur général pour la construction d’une nouvelle prison migrante à Laval

QUOI : Conférence de presse
OÙ : 400 Montée Saint-François, Laval, QC H7C 1S7
QUAND : Lundi le 15 juillet 2019 à 10h30
CONFERENCIER·IÈRE·S :
Amy Darwish, Solidarité sans frontières
May Chiu, Association des juristes progressistes
Carmelo Monge, les Mexicain-es uni-es pour la régularisation
Marlihan Lopez, Fédération des femmes du Québec
Morgan McGinn, Climate Justice Montreal
etc.

Les journalistes sont invité·e·s à une conférence de presse en réponse à l’annonce, par Ottawa, du nom de l’entrepreneur générale qui sera responsable de la construction de la nouvelle prison migrante à Laval. Cette étape importante indique donc que la construction pourrait commencer très prochainement.

La conférence de presse aura lieu sur le site où la nouvelle prison est censée être construite.

Plus de soixante dix organisations ont déjà signé une déclaration ( http://www.solidarityacrossborders.org/fr/no-to-a-new-prison-for-refugees-and-migrants-in-laval ) les engageant à œuvrer contre la construction de la nouvelle prison migrante à Laval.

Le gouvernement fédéral a annoncé l’investissement de 138 millions de dollars pour la construction de deux nouvelles prisons migrantes, une à Surrey (Colombie-Britannique) et une à Laval (Québec). À ce jour, des contrats d’une valeur de cinq millions de dollars ont été accordés à deux firmes, Lemay et Groupe A.

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Source : Solidarité sans frontières

http://www.solidarityacrossborders.org/fr/background-immigration-detention-in-canada-and-the-new-refugee-prison-in-laval

La répression dans les pays capitalistes avancés

Vu la qualité et la richesse de l’étude sur la répression de James F. Petras, professeur de sociologie à l’Université de New York , nous en publions l’intégralité. À noter cependant que les propos de l’étude n’engagent que son auteur.

 

 

L’idée a été longtemps admise, dans les milieux de gauche et même d’extrême gauche, que, hormis l’éventualité d’une crise économique et d’un affrontement de classes majeurs, la coercition physique et la répression exercée par l’Etat policier dans les pays capitalistes avancés n’étaient que des phénomènes purement épisodiques dus à l’influence des caractéristiques propres de certaines personnalités, ou à des débordements bureaucratiques. L’hégémonie idéologique et la manipulation de l’appareil idéologique et politique étaient censées constituer la «norme» dans les démocraties capitalistes (1), la violence politique et les actes illégaux ou «extra-légaux» des autorités relevant des «régimes d’exception».

Depuis quelque temps, un nombre considérable d’informations viennent démentir ces hypothèses (2). Derrière le rituel des élections et des débats publics, un vaste réseau de services officiels est impliqué à longueur d’année dans la violation des droits démocratiques des citoyens, des partis et des mouvements exerçant des activités politiques légales.

Conçues de manière bureaucratise et à grande échelle, exécutées clandestinement et visant des objectifs à long terme, les activités de l’Etat policier font désormais partie de la routine de la vie politique dans les pays capitalistes, notamment aux Etats-Unis. La distinction entre les activités politiques relativement bien établies et les mouvements «subversifs» marginaux ou peu organisés tend ainsi à s’estomper, quant à leur aptitude à être pris, comme cibles de l’action des services de surveillance et d’espionnage (l’affaire du Watergate en est un exemple).

Quand, il y a trois ans, je demandais à obtenir communication de mon dossier politique, en application de la loi sur la liberté de l’information, mon avocat écrivit au moins à dix-huit agences du gouvernement américain pour obtenir ces renseignements : services secrets, département d’Etat, F.B.I. Certaines répondirent qu’elles ne détenaient pas de dossier à mon sujet. D’autres envoyèrent des renseignements restreints. La masse des informations provint du F.B.I. et de la C.I.A., la plupart des documents étant censurés pour raison de «sécurité nationale».

Ces deux derniers organismes, constituent, avec les services de renseignement de l’armée, l’Agence de renseignement de la défense nationale, l’Agence de sécurité nationale, la direction des impôts, les chambres d’accusation et des douzaines d’organismes politiques locaux (le Chicago Red Squad a admis qu’il détenait près de deux cent mille dossiers), la panoplie des agences de renseignement parallèles (et faisant parfois double emploi) impliquées dans la répression de l’activité politique. L’importance des efforts consacrés par ces agences à la répression politique (par opposition à la lutte contre le crime organisé) a été révélée par une étude qui démontre qu’à 40% le temps d’une unité moyenne du F.B.I. est absorbé par des tâches de surveillance politique (3).

La croissance de l’appareil policier aux Etats-Unis s’est accompagnée d’une prolifération de ses activités, stimulée par le développement des techniques informatiques. En 1968, seuls dix Etats sur quarante-neuf disposaient d’un système de renseignement automatisé; en 1972, quarante-sept Etats en étalent pourvus, tous ces systèmes étant connectés avec le système central du F.B.I. (4). En outre, les organismes existants se politisent de plus en plus : la Commission de la fonction publique a répertorié des centaines de milliers de noms de personnes considérées comme de gauche; le Bureau des narcotiques combine un rôle politique (provocation) avec sa tache officielle; le Bureau des passeports détient des listes politiques; la Division des renseignements des postes contrôle tout courrier politique; le ministère de la Justice, enfin, accumule d’épais dossiers sur les contestataires, quels qu’ils soient. Le F.B.I. disposerait, rien qu’à Washington, de plus de cinq cent mille dossiers de renseignements portant sur des groupes ou des individus présents aux Etats-Unis (5).

Les activités de l’Etat policier ont pour but exprès de «dénoncer, démanteler, détourner, discréditer et en tout cas neutraliser» (6)toute opposition politique, qu’elle provienne des Noirs, de la gauche en général, ou de tout groupe qui a pu encourir l’épithète de «subversif». Ces activités ont effectivement affaibli la capacité des individus (Noirs, étudiants…) à exercer leurs droits démocratiques dans la poursuite de leurs objectifs politiques et sociaux. Ainsi est-il possible, sans abroger aucune des lois existantes, d’empêcher l’opposition d’exercer effectivement ses droits civiques.

Les cibles principales de l’appareil répressif de l’Etat sont les minorités ethniques, les femmes, les mouvements pour la paix et les étudiants. Le F.B.I. consacre 95% de son temps à harceler la gauche (7).

En Allemagne de l’Ouest, la politique du «Berufsverbot» (interdictions professionnelles) tend à punir toute activité de protestation présente et passée, afin de prévenir toute opposition future. Elle se traduit par le «non recrutement, le licenciement, le refus de titularisation (et autres mesures disciplinaires frappant les fonctionnaires de tous niveaux dont le loyalisme est considéré comme douteux). Ce doute est généralement fondé sur un comportement présumé qui est parfaitement légal» (8). En vertu de cette législation, au moins quatre mille personnes ont perdu leur emploi, et un nombre encore plus élevé de libraires, d’éditeurs ou de parents ont fait l’objet de tentatives d’intimidation qui ont conduit même les sociaux-démocrates européens les plus modérés à manifester leur indignation. Parmi les professions les plus touchées, on compte les professions libérales, les enseignants, les travailleurs sociaux et les avocats… Le S.P.D.., (parti, social-démocrate allemand) courtise désormais l’électorat de droite, après avoir détruit par la cooptation au sein des comités du parti et par la répression toute solution de rechange organisée à gauche. En l’absence d’un mouvement de masse à gauche capable d’intervenir, de manière organisée et cohérente, en faveur de la défense des libertés démocratiques, la surenchère se donne libre cours entre les deux principaux partis pour obtenir le soutien de la droite sur la base d’une politique de répression.

Le poids de l’intervention de l’Etat s’est fait sentir aussi bien sur les mouvements politiques déclinants que sur ceux qui prenaient leur essor. L’utilisation de «plombiers» (aux Etats-Unis) ou d’articles constitutionnels (l’article 18 en Allemagne de l’Ouest) reflète la différence des contextes politiques au sein desquels les mesures autoritaires sont prises. Aux Etats-Unis, pendant les années 60 et au début des années 70, un vaste mouvement de protestation rassemble des millions de citoyens, incluant des politiciens de Washington comme des G.I. de Saïgon. L’utilisation, à l’époque, de moyens législatifs pour briser ce mouvement aurait signifié la fin de l’image de marque démocratique derrière laquelle l’Etat policier cachait ses premiers pas. La dénonciation de l’Etat policier et les révélations qui s’ensuivirent sur ses activités illustrèrent le conflit et les luttes qui peuvent surgir entre l’appareil démocratique et celui de l’Etat policier quand une force populaire se manifeste activement et agressivement.

La doctrine de la sécurité nationale

Malgré une tendance constante à l’érosion des droits démocratiques au sein des pays capitalistes avancés. Il existe dans ces pays un besoin non moins constant de renouveler les croyances qui soutiennent l’ordre politique existant (9). La base idéologique de la domination de la classe capitaliste en Occident est liée à la notion de démocratie, ainsi qu’à l’élection et au contrôle par les citoyens de leurs représentants politiques. Sans hégémonie idéologique (10), la société serait confrontée à l’alternative hobbésienne : guerre civile destructrice ou dictature coercitive et coûteuse. Le danger, cependant, pour la classe capitaliste et ses Institutions ancillaires (armée et police) est que cette structure «idéologique» devient sans cesse la base d’un défi aux prérogatives du capital. D’où la recherche constante d’autres armes idéologiques susceptibles de limiter l’application effective des droits démocratiques et de créer des liens de cohésion interne qui coupent au travers de la structure de classes.

Depuis l’époque où les Etats-Unis commencèrent à s’opposer de par le monde aux révolutions sociales et nationales (à la fin des années 40), la raison la plus souvent invoquée pour justifier la répression intérieure et extérieure fut la doctrine de la sécurité nationale (11). Ce terme en soi est un euphémisme pour décrire la répression de classe. La doctrine consistait à exploiter les loyalismes ultra-nationalistes et les sentiments d’insécurité personnelle et politique : ainsi les problèmes de classe exploitation, chômage, racisme, sexisme, etc. disparaissaient dans un système de pensée légitimant l’ordre social existant et voulant que le problème fondamental, soit celui du renforcement de l’appareil d’Etat contre l’«agression des Etats étrangers».

Tous ceux qui défiaient l’ordre social et l’Etat devenaient ainsi par définition des «agents des puissances étrangères», ou encore dans le langage bureaucratique, «des menaces pour la sécurité nationale». L’imagerie, aussi bien que la doctrine elle-même, créait la Justification de la répression : les autorités répressives et leurs «partisans» étaient décrits comme des «patriotes» et les «défenseurs» d’une notion abstraite de la loi et de l’ordre (même s’ils violaient eux-mêmes cette loi), tandis que leurs adversaires étaient qualifiés de xénophiles sympathisant secrètement avec des terroristes sans foi ni loi.

Répression internationale, luttes de classes et conflits nationaux

Le trait principal de l’économie mondiale capitaliste aujourd’hui est le caractère permanent de la crise, révélé par un chômage massif et chronique et par la montée des taux d’inflation (12). Récession et inflation sont utilisées par l’Etat capitaliste pour justifier des politiques de limitation des salaires et de rationalisation du procès de travail (licenciements, intensification de l’exploitation).

L’impact inégal de la crise capitaliste a suscité une répression sélective à l’encontre des groupes et des segments de la classe ouvrière les plus touchés. En Allemagne et aux Etats-Unis, contrôles, descentes de police et expulsions, visent systématiquement les travailleurs dits «étrangers» (13); en Italie, la police harcèle les jeunes chômeurs sous prétexte de lutter contre le «terrorisme». Les mesures autoritaires frappant ces catégories de travailleurs sont les premières offensives par lesquelles l’Etat capitaliste tente d’affaiblir le pouvoir collectif de la classe ouvrière et de restaurer la capacité du capital à sortir de sa crise d’accumulation.

Dans sa fonction répressive à rencontre de certains secteurs de la classe ouvrière, l’appareil policier de l’Etat a été grandement aidé par certains mouvements syndicaux. Aux Etats-Unis, la direction de l’A.F.L.-C.I.O. a sapé sans relâche les bases d’un mouvement ouvrier unifié en concentrant son action sur des problèmes de travail restreints et sur des questions de salaires, et en collaborant ouvertement avec la politique étrangère de l’Etat impérialiste par ses prises de position «protectionnistes» empreintes d’un chauvinisme profond à l’égard des travailleurs des autres pays. Chacune de ces prises de position a eu un effet en retour appréciable : le soutien accordé aux dictatures anticommunistes à l’étranger a facilité l’exode des capitaux américains vers les pays a main-d’œuvre captive; la campagne contre les travailleurs en situation irrégulière a contraint ceux-ci à accepter des salaires plus faibles, favorisant ainsi une pression à la baisse des salaires en général; l’incapacité à se battre pour autre chose que des contrats salariaux spécifiques a entraîné la détérioration des services sociaux et du soutien de l’opinion publique aux travailleurs. Le résultat final est qu’il est de plus en plus difficile d’organiser les travailleurs américains : la part des ouvriers syndiqués dans le total de la force de travail est passée de 40% dans les années 40 à 20% en 1978.

Traditionnellement les politiques conduites par les bureaucraties syndicales en Europe n’ont pas été aussi conservatrices ni aussi indulgentes à l’égard du capital qu’aux Etats-Unis, mais il semble bien que la même évolution s’y fasse jour. Confrontées à la récession, les directions des partis sociaux-démocrates et même communistes ont déjà, dans certains cas, été amenées à accepter la politique de licenciement, de blocage et de baisse des salaires.

Les sociaux-démocrates allemands ont soutenu l’expulsion de cinq cent mille travailleurs étrangers comme moyen d’amortir les effets de la crise économique : une politique semblable est pratiquée en Suisse; en France, la tendance est de plus en plus à des restrictions. La politique de mise en chômage des Jeunes et des étudiants en Italie, et en Europe, en général, reste ignorée des partis «de gauche», et le soutien qu’ils accordent aux nouvelles lois répressives destinées à prévenir les manifestations des victimes du sous-emploi et du chômage en dit long sur le resserrement des liens entre les bureaucraties coupées des masses et l’Etat capitaliste. L’attitude qui consiste à brader les intérêts d’une partie de la classe ouvrière pour protéger ceux d’une autre partie (les travailleurs nationaux adultes pourvus d’un emploi contre les travailleurs étrangers, les jeunes et les chômeurs) crée les conditions d’une escalade de la répression. L’Etat capitaliste, qui utilise la législation répressive et «antiterroriste» contre une partie de la classe ouvrière aujourd’hui, pourra l’utiliser demain contre l’autre, en fonction de l’aggravation éventuelle de la crise économique et de la capacité des travailleurs à déclencher une contre-offensive de masse pour la défense des libertés démocratiques.

L’aggravation de la concurrence entre pays capitalistes, la crise énergétique, l’accumulation impressionnante des excédents de capacité dans les Industries de base à l’échelle mondiale, ont exacerbé les difficultés de la reproduction du capital : la rivalité pour conquérir les marchés et les ressources oblige chaque classe capitaliste à redoubler d’efforts pour comprimer les coûts salariaux afin de tenter d’obtenir des avantages marginaux. Le rôle de l’Etat capitaliste devient de plus en plus décisif dans la définition des conditions d’une poursuite de l’expansion. Là où la bureaucratie ouvrière peut être cooptée et quand elle est en mesure de conserver la direction de la majorité des travailleurs, la législation répressive est dirigée contre les «outsiders» : syndicats dissidents, prétendument «extrémistes», minorités nationales, etc. Là où la cooptation ne peut se faire et quand la bureaucratie perd le contrôle de ses militants, l’appareil de sécurité nationale entrera en action avec sa panoplie répressive.

Quand s’ouvre ainsi une période de crise aigüe des régimes politiques démocratiques, les structures formelles de la démocratie peuvent se maintenir, certes, mais le contenu et la substance du système politique seront plus en plus modelés par l’appareil bureaucratique, à moins qu’un mouvement démocratique de masse n’impose le lien entre les problèmes de la répression socio-économique et ceux de la répression politique (14). Une condition préalable en serait la démystification de la doctrine de la sécurité nationale, la dénonciation de sa vraie nature d’outil de répression de classe à l’intérieur et à l’étranger. Une contre-offensive des forces populaires démocratiques devrait rejeter les appels à une «mobilisation derrière un Etat fort» comme ceux que l’on entend en Italie et que l’on entendra sans doute bientôt dans les pays où s’il n’existe pas de terroristes, il faudra en inventer. Le combat pour des droits démocratiques devrait plutôt être associé à une défense claire et énergique des droits spécifiques de la classe ouvrière, en particulier des secteurs de celle-ci qui ont été le plus durement touchés pour l’instant : chômeurs, jeunes, minorités nationales et travailleurs immigrés.

James F. Petras

Professeur de sociologie à l’université de l’Etat de New-York, Binghamton.

Il y a 54 ans, Malcolm X était assassiné

Pour l’anniversaire de la mort de Malcolm X, nous publions avec l’aimable autorisation des éditions Syllepse, un chapitre de la magistrale biographie de l’activiste américain par Manning Marable. Cet extrait du chapitre 15 de l’ouvrage, unique biographie disponible en français et référence majeur de ce pan de l’histoire du mouvement afro-américain, revient sur la journée où Malcolm X fut assassiné, à une période où son évolution politique le poussait vers les idées socialistes.

Malcolm X, une vie de réinventions (1925-1965), 768 pages, 23 euros, éditions Syllepse

À Newark, de l’autre côté de l’Hudson, la petite équipe d’assassins, formée au printemps de 1964 [de membres de la Nation of Islam dont Malcolm X a été le porte-parole], s’est dispersée quand Malcolm est parti à l’étranger. Mais, dès son retour, la question de son assassinat et de ses modalités d’exécution est remise sur la table. Talmadge Hayer a alors plusieurs discussions avec Ben Thomas et Leon Davis. Il racontera plus tard à Peter Goldman que puisque Ben Thomas était un des administrateurs de la Mosquée, il avait naturellement supposé que la direction de la Nation avait autorisé la mission. « Je n’ai pas posé beaucoup de questions, expliquera Hayer, j’ai pensé que quelqu’un avait donné les ordres : « Frère, voilà ce que tu dois faire. » J’ai senti que nous étions d’accord . » [1]

Étudiant la façon d’opérer, le groupe envisage d’abord d’abattre Malcolm devant chez lui à East Elmhurst. Mais, après avoir effectué une reconnaissance, les tueurs constatent que la maison est hautement protégée par des gardes du corps armés. Ils envisagent ensuite de suivre Malcolm dans Harlem et de frapper pendant une réunion publique où il est censé prendre la parole ; ce qui n’est pas possible, selon Hayer, pour diverses considérations pratiques, notamment parce que les conspirateurs de Newark ont un emploi à temps plein et ne peuvent donc pas s’absenter de leur travail pour passer la journée à circuler dans Harlem. Aussi, le groupe finit-il par choisir un mode opératoire simple, mais audacieux : ils tireront sur Malcolm à l’occasion d’un rassemblement à l’Audubon, devant des centaines de partisans et quelques dizaines de membres du service d’ordre probablement armés. La force de ce plan réside dans l’effet de surprise. Les amis de Malcolm pensent en effet qu’il est en sécurité dans les meetings et ils n’ont jamais envisagé un assaut frontal qui leur semble suicidaire. Dévoué à Elijah Muhammad, chacun des membres de l’équipe d’assassins est prêt à sacrifier sa vie pour tuer Malcolm. [2] Lorsqu’un tueur est prêt à mourir, n’importe qui peut être assassiné.

Le succès de l’opération s’annonçait « aléatoire, se souvient Hayer, mais nous sentions que c’est ainsi que nous devions procéder […] et c’est ce que nous avons fait. Pourquoi à cet endroit ? […] Tout simplement parce que c’était le seul endroit où nous savions qu’il serait ». [3] Familier des armes à feu, Hayer est désigné pour en faire l’acquisition et les paie de sa poche. Lui et les autres membres de l’équipe assistent, probablement en janvier 1965, à un rassemblement de l’OAAU, où ils ont la surprise de découvrir que personne n’est fouillé à l’entrée. Ils s’assoient, observent où se tiennent les membres du service d’ordre et notent quand ils sont relevés. Le soir du 20 février, le groupe paie son entrée pour passer la soirée au dancing de l’Audubon et vérifier ainsi toutes les issues possibles.
Les conspirateurs retournent ensuite en voiture au domicile de Ben Thomas où ils décident que le coup de feu décisif sera tiré par William Bradley. « Willie » a été un athlète vedette au lycée, où il a brillé au baseball. Vers l’âge de vingt-cinq ans, il a pris du poids. Il pèse désormais plus de 100 kg, mais il est encore athlétique dans sa façon de se déplacer et sait se servir d’un fusil. Le groupe se met d’accord sur la date du meurtre qui est fixée au dimanche 21 février dans l’après-midi. [4]

***

Ce matin-là, dans sa chambre du Hilton, Malcolm est réveillé par un coup de téléphone. Une voix menaçante lui dit : « Réveille-toi, frère. » Il regarde l’heure, il est 8 heures, en ce matin d’hiver qui ne s’annonce néanmoins pas glacial. [5]

Aux environs de 9 heures, il téléphone à Betty, lui demandant de venir avec les enfants au rassemblement de l’après-midi. Elle est surprise et ravie de cette demande, car depuis son retour d’Afrique, Malcolm l’a à nouveau dissuadée de s’impliquer dans la MMI et l’OAAU et, encore au début de cette même semaine, il lui a strictement interdit de venir à ce rassemblement à cause des risques de violence. Il ne lui explique cependant pas pourquoi il a changé d’avis. Vers 13 heures, Betty et ses filles, qui vivent alors toujours chez les Wallace, commencent à se préparer. Si Malcolm a pensé que son dernier jour était arrivé, pourquoi aurait-il demandé à Betty d’amener les enfants pour qu’ils soient témoins de son meurtre ? Il est en effet possible que, malgré le danger qui le menace, il n’est pas absolument certain de sa fin. Il se peut aussi qu’il y ait eu chez lui une sorte d’ambivalence, un mécanisme de défense le conduisant à ne pas vouloir penser à ce qui était inévitable et qui le terrifiait. Peut-être aussi, à l’instar d’Hussein, voulait-il que sa mort devienne un symbole, une passion exprimant ses croyances.

À 13 heures, Malcolm quitte le Hilton au volant de son Olds-mobile et prend la direction du haut de la ville.
En pénétrant dans l’Audubon, il est possible que Malcolm ait remarqué l’absence des policiers habituellement en faction devant l’immeuble. Selon Peter Goldman, un des lieutenants de Malcolm « avait demandé au capitaine que la police quitte l’immeuble et qu’elle se poste dans un endroit moins visible ». Étant donné l’attentat récent et les restrictions imposées par Malcolm – ni armes ni fouilles à l’entrée –, il est difficile de comprendre tant la logique d’une telle demande que les raisons pour lesquelles la police y a consenti. Dix-huit policiers sont donc postés quelques pâtés de maisons plus loin sur Broadway, devant le Columbia Presbyterian Hospital [6]

De l’entrée à la scène du fond en contre-plaqué, la salle mesure une cinquantaine de mètres. Dans une petite pièce située derrière la scène, Sara Mitchell, James 67X et Benjamin 2X attendent l’arrivée de Malcolm. Quand il entre, ils sentent immédiatement que leur dirigeant est de mauvaise humeur. Après s’être laissé tomber sur une chaise métallique pliante, il se relève quelques minutes plus tard pour faire les cent pas nerveusement. Benjamin se souvient qu’« il était dans un état de tension comme je ne l’avais jamais vu. […] Il perdait tout simplement le contrôle de lui-même ». James lui explique que le secrétaire de Galamison lui a téléphoné quelques heures auparavant pour lui dire que son emploi du temps est trop chargé pour venir prendre la parole devant le public réuni à l’Audubon cet après-midi-là. Malcolm lui ayant demandé pourquoi il n’en a pas été informé plus tôt, James lui rappelle prudemment qu’il a oublié la veille de lui indiquer où il devait passer la nuit et qu’il n’a donc eu aucun moyen de le contacter. James l’informe qu’il a appelé Betty plusieurs heures auparavant afin qu’elle lui transmette l’information. Malcolm explose : « Tu as donné ce message à une femme ! […] Tu devrais être plus avisé ! » [7] Il se déchaîne ensuite contre tous ceux qui sont présents et quand cheikh Hassoun essaye de le prendre dans ses bras, il lui hurle : « Va-t’en ! » [8] Après avoir quitté la pièce avec Hassoun, Benjamin monte sur le podium pour ouvrir la réunion.

Quelques minutes après, Malcolm s’excuse tranquillement auprès de ceux qui sont restés avec lui. « Il y a quelque chose ici qui ne va pas », leur dit-il, en ajoutant qu’il se sentait quasiment « au bout du rouleau ». Le programme de l’OAAU, qui doit être présenté cet après-midi-là, a déjà été repoussé une première fois à cause de l’attentat, et n’est toujours pas prêt. Galamison et plusieurs des orateurs invités sont absents. Le succès du rassemblement repose désormais sur le brio du discours de Malcolm. « Dans les coulisses, Malcolm essayait de mettre de côté ses propres problèmes, observe Mitchell, et quand quelqu’un suggérait qu’il devrait pour une fois laisser les gens s’inquiéter pour lui, un peu irrité, il répondait : « Peu importe ce qui m’est arrivé, je ne suis pas ici pour me plaindre. Ce que je dis doit être dit en ayant les problèmes [des gens] à l’esprit » ». [9]

Ébranlé par l’accès de colère de Malcolm, Benjamin cherche à rassembler ses esprits au cours des premières minutes de son intervention. À plusieurs reprises, il demande au public de « rester assis et de ne pas se tenir dans les allées ». Après cinq bonnes minutes, de tergiversations, il entame son discours en rappelant que cela fait déjà plus d’un an que Malcolm a commencé à s’exprimer contre l’intervention américaine dans le Sud-Est asiatique. Benjamin s’exclame :

«C’est la raison pour laquelle, lorsque frère Malcolm se présentera à vous ce soir, j’espère que vous ouvrirez votre esprit et vos oreilles, il essaye de faire tout ce qu’il peut pour nous venir en aide sans l’approbation du pouvoir qui contrôle le système politique dans lequel vous et moi vivons.»

Sans faire référence à l’attentat et aux incessantes menaces de mort, Benjamin souligne le courage du leader et les sacrifices qu’il fait pour la cause commune. À chaque fois qu’un homme comme cela « est parmi nous, il ne se préoccupe pas des conséquences personnelles, il ne se préoccupe que du bien-être du peuple, c’est un homme bon. Un tel homme, souligne Benjamin, doit être soutenu. Un tel homme doit réussir. Parce que les hommes de ce genre ne surgissent pas tous les jours. Peu d’hommes sont prêts à risquer leur vie pour les autres ». Quelqu’un dans l’assistance approuve en criant : « C’est vrai ! » La plupart des gens « choisiraient de fuir la mort, même s’ils ont raison », continue Benjamin. Malcolm, dit-il encore, est indubitablement un leader « qui ne se préoccupe pas des conséquences, qui ne se préoccupe que du peuple. […]. J’espère que vous le comprenez ». C’est à cet instant qu’éclatent les applaudissements. [10]

Alors que Benjamin 2X continue son discours, les retardataires se pressent devant l’entrée principale de l’Audubon et dans le hall du premier étage. Betty arrive aux alentours de 14 h 50. Pour certains des partisans de Malcolm, l’arrivée de sœur Betty est une agréable surprise, car elle n’a fait que quelques rares apparitions publiques depuis le retour d’Afrique de Malcolm. Jessie 8X Ryan, membre de la MMI, quitte le siège où il est assis aux côtés de sa femme pour escorter Betty et ses enfants vers un box situé près de la scène. [11] L’apparition de Betty signale au public que Malcolm va sans aucun doute bientôt entrer en scène. Environ 400 personnes sont alors réunies dans la salle de danse.

À 14 h 55, les membres du service d’ordre de la MMI sont informés du troisième et dernier changement dans la répartition des tâches. Quelques minutes avant 15 heures, sans prévenir, Malcolm monte énergiquement sur la scène avec un porte-documents à la main et s’assoit près de Benjamin 2X. « Sans plus de cérémonie, je vous présente le ministre Malcolm », lance précipitamment Benjamin. [Retranscription du discours de Benjamin 2X Goodman. La reconstitution faite par la suite par Benjamin ne concorde pas vraiment avec ce qu’il a dit le 21 février 1965. Au journaliste et historien Peter Goldman, Benjamin raconte avoir annoncé Malcolm avec ses mots vibrants : « Je vous présente […] quelqu’un qui veut se mettre en première ligne pour vous. […] Un homme qui donnerait sa vie pour vous ». Voir Goldman, The Death and Life of Malcolm X, p. 271-273.]] Alors que les applaudissements crépitent, Benjamin s’éloigne comme il se doit du pupitre. Malcolm le retient, se penche légèrement vers lui et lui demande d’aller voir si Galamison était arrivé. Celui-ci ayant annulé sa venue, la demande n’a aucun sens, mais Benjamin, obéissant, quitte la scène et Malcolm s’approche du pupitre.

Les applaudissements enthousiastes durent environ une minute, pendant laquelle Malcolm contemple son public admiratif. Sur sa gauche, Gene X Roberts, son garde du corps, quitte tranquillement son poste pour se diriger rapidement vers l’arrière de la salle, à quelques mètres seulement de Reuben X Francis. Que ce déplacement soit une coïncidence ou qu’il l’ait fait à dessein, Gene X Roberts échappera ainsi aux premiers coups de feu qui éclateront quelques secondes plus tard. Malcolm salue la salle avec les traditionnels mots de bienvenue en arabe « as-salám ’aláykum », auxquels des centaines de voix de la salle répondent : « Wa-’aláykum as-salám ».

Avant qu’il n’ait pu prononcer un mot de plus, un chahut éclate au sixième ou septième rang : « Sors tes mains de mes poches », hurle Wilbur McKinley à un autre des conjurés assis près de lui. Alors qu’ils font semblant de se quereller, la bousculade attire l’attention du public, ainsi que celle du service d’ordre. Depuis l’estrade, Malcolm crie à plusieurs reprises « Arrêtez ! Arrêtez ! Arrêtez ! Arrêtez ! ». [12]

Les deux gardes du corps principaux postés sur l’estrade cet après-midi-là sont Charles X Blackwell et Robert 35X Smith, ce qui est inhabituel, car ils n’ont que peu d’expérience en matière de protection. Ils ont rarement été investis de ce type de mission. Ce jour-là, William 64X George, qui a souvent été affecté à la protection de Malcolm sur scène, est posté à l’extérieur. Lorsque la dispute éclate, Blackwell et Smith commettent une erreur tactique en quittant leur poste pour se diriger vers les hommes en train de se chamailler. Gene Roberts, George Whitney et d’autres hommes de la sécurité s’approchent des deux hommes par l’arrière. [13] Malcolm est désormais absolument seul et sans protection sur le podium. Au même moment, une grenade fumigène est mise à feu tout au fond de la salle, créant instantanément la panique, déclenchant les hurlements et semant la confusion. C’est le moment que choisit Willie Bradley, assis au premier rang, pour se lever et se diriger rapidement vers la scène. Il s’arrête à cinq mètres de celle-ci, sort le fusil à canon scié qu’il dissimule sous son manteau, vise soigneusement et fait feu. Les plombs atteignent directement Malcolm au flanc gauche, découpant un cercle de 18 centimètres autour de la région du cœur. C’est ce tir-là qui tue Malcolm X, car si les autres projectiles causent de terribles dommages, ils ne sont pas fatals.

Bizarrement, ce coup de feu ne précipite pas Malcolm à terre. Comme se le rappelle Herman Ferguson, « il y a eu une forte détonation, un fracas qui a rempli la salle, le bruit d’une arme ». À ce signal, deux hommes – Hayer, au premier rang et armé d’un .45 qu’il porte contre son ventre et Leon X Davis, assis près de lui et qui porte lui aussi une arme de poing – se lèvent, se précipitent vers le podium et vident leurs chargeurs sur Malcolm. Ferguson, toujours assis à quelques mètres de l’estrade, assiste directement à la scène :

«Malcolm s’est redressé un moment […], il a levé la main et s’est raidi. Un des assassins [a fait feu] avec son fusil à bout de bras. […] Il a touché Malcolm à bout portant sur le côté gauche de la poitrine […]. Ensuite, une fusillade a éclaté. […] Elle a duré quelques secondes. Je me souviens avoir dit : « Si jamais ils arrêtent de tirer, peut-être survivra-t-il… » Quand ils ont cessé de tirer, Malcolm s’est effondré sur le dos […] et l’arrière de sa tête a violemment heurté le sol.» [14]

Ferguson est peut-être le seul témoin oculaire qui ne se soit pas jeté sur le sol pour échapper aux balles :
Après tant de bruit, de coups de feu, de cris, etc., il y eut un silence soudain. […] Je pouvais voir toutes les chaises renversées et les gens couchés sur le sol. Il y avait trois hommes dans l’allée centrale, devant la porte. L’un d’entre eux avait une sorte d’arme à la main. Ils se tenaient dans une rangée, l’un derrière l’autre. Ils [étaient] immobiles dans la rangée. Ils sont restés figés ainsi un temps [et] l’espace de quelques secondes supplémentaires, puis se sont enfuis en sautant par-dessus les chaises et les gens couchés par terre. [15]

La plupart des membres du service d’ordre ont également cherché à se mettre à couvert dès le premier coup de feu, sans faire le moindre geste pour protéger Malcolm ou arrêter ses meurtriers. Charles X Blackwell et Robert 35X Smith, qui gardaient la tribune, ont quitté leur poste et se sont jetés au sol pour se protéger. John X Davis, officiellement responsable de la sécurité du podium, a reconnu par la suite, devant la police que lui aussi « s’était jeté par terre » dès le début de la fusillade. [16] Il en est de même de Charles 37X Kenyatta qui a plus tard affirmé « n’avoir rien vu ». [17]

Plusieurs témoins oculaires racontent que Bradley aurait ensuite pivoté sur la gauche et tiré une seconde fois par-dessus la tête du public en manquant Ferguson de peu. Il emprunte ensuite le couloir situé à droite de la salle pour se faufiler dans les toilettes des femmes situées à moins de vingt mètres de la scène. Il y abandonne son fusil. Il parvient facilement à s’échapper, peut-être en compagnie d’un complice, par un escalier de secours étroit menant directement dehors. De manière inexplicable, les deux autres tireurs, Hayer et Leon X Davis, se risquent à sauter par-dessus les chaises et les gens, pour tenter de fuir par l’entrée principale sur la 166e Rue Ouest, située à une cinquantaine de mètres. Ajoutant à la confusion, le fumigène artisanal, composé d’un paquet d’allumettes empaqueté dans une chaussette, continue à enfumer la salle de danse.

Les deux tireurs, qui tentent de s’échapper par l’entrée principale, espèrent se fondre dans la foule paniquée, mais avant même qu’ils aient franchi la moitié de la salle, Gene Roberts les intercepte. L’un des assaillants, sans doute Hayer, lui tire dessus à bout portant, mais la balle traverse son manteau sans le toucher. Attrapant une chaise pliante, Roberts la jette dans les jambes de Hayer et le fait trébucher. Alors qu’il tente de se faufiler vers la sortie au travers de la foule compacte, Reuben X Francis qui se tient à environ deux mètres cinquante, lui tire dessus à trois reprises. Touché à la cuisse gauche par une balle, Hayer trébuche, mais se rue dans l’escalier où il est intercepté par les partisans de Malcolm furieux qui le frappent violemment. Dans la confusion, Leon X et les autres conspirateurs réussissent à s’échapper. [18]

De la porte d’entrée, William 64X George a entendu le bruit de la fusillade et s’est précipité dans la rue pour avertir la police qui arrive sur les lieux une minute plus tard. De retour devant l’Audubon, William constate que deux frères de la MMI et de l’OAAU, Alvin Johnson et George 44X, se sont emparés de Hayer qu’ils maintiennent au sol. « La foule a alors commencé à le frapper », racontera plus tard William. [19] Sur les lieux, un agent de police, Thomas Hoy, tente de faire entrer Hayer à l’arrière de sa voiture de patrouille. Arrivés en voiture quelques instants plus tard, le sergent Alvin Aronoff et l’agent de police Louis Angelos aident Hoy à disperser la foule en colère. Aronoff tire en l’air et les policiers réussissent enfin à mettre Hayer en sécurité dans la voiture de patrouille.

C’est un journaliste indépendant, Welton Smith, qui fournit le témoignage le plus détaillé. Dans son article qui paraît dans le New York Herald Tribune, il décrit un homme portant « un manteau noir se tenant au milieu de la salle » qui s’est brusquement levé en « [criant] à quelqu’un qui était à côté de lui : « Sors ta main de ma poche ! » » Les coups de feu ont ensuite éclaté, alors que Smith est lui-même brusquement jeté à terre par la bousculade. La fusillade dure « quinze secondes » et alors qu’il se relève, Smith aperçoit deux hommes à la poursuite de l’homme au manteau noir qui se retourne pour tirer sur ses poursuivants alors qu’il tente de fuir vers l’entrée principale. Ayant repéré la bombe fumigène à l’arrière de la salle, Smith étouffe la mèche et cherche de l’eau pour l’éteindre. Quelques minutes plus tard, il voit environ huit personnes penchées sur Malcolm, alors que les membres du service d’ordre de la MMI essaient d’empêcher les gens de s’attrouper sur la scène. Penché sur Malcolm, Yuri Kochiyama, membre de l’OAAU, crie : « Il est encore vivant ! Son cœur bat encore ! » [20]

Betty n’a heureusement vu que les toutes premières secondes de l’assassinat de son mari. Lorsqu’elle a entendu la première détonation[, elle s’est en effet instinctivement tournée vers la scène. « Il n’y avait personne d’autre sur qui tirer », se souvient-elle. L’arme à la main, les deux autres tueurs se sont ensuite avancés pour faire feu. Betty racontera plus tard qu’elle a vu son mari s’effondrer sous le feu croisé des tireurs. Toutefois, des témoins certifient l’avoir vu réunir ses enfants terrifiés, les jeter au sol pour les protéger de son corps, en se servant d’un banc en bois comme bouclier de fortune. Au milieu des coups de feu, Betty hurle : « Ils sont en train de tuer mon mari ! » Pendant que les assassins prennent la fuite, les enfants commencent à pleurer et crier. « Est-ce qu’ils vont tuer tout le monde ? », demande une des filles. Betty voit les gens accourir sur la scène, accablée par la gravité des blessures de Malcolm. Elle se relève ensuite et, sanglotant et criant, se précipite vers Malcolm. Des amis tentent de la retenir voyant qu’elle est en proie à une crise de nerfs. [21] Après s’être assuré de la sécurité de sa femme Joan, assise au premier rang près des journalistes, Gene Roberts se rue sur la scène. Comprenant immédiatement que Malcolm est mort, il tente malgré tout de le ranimer désespérément en lui faisant du bouche-à-bouche. [22] Profondément traumatisée par le meurtre et par son mari qui a frôlé la mort, Joan Roberts s’écroule en sanglots dans le taxi qui les ramène chez eux. Quarante ans plus tard, Gene Roberts admet que « l’horreur de l’événement l’a habitée pendant des années ».

Alors que la fumée plane encore, incrédules et stupéfaits par ce qui s’est passé, les membres de la MMI et de l’OAAU errent sans but dans la salle de danse. Lorsque le premier coup de feu retentit, Earl Grant, un journaliste membre de l’OAAU, est installé dans la cabine téléphonique située près de l’entrée, occupé à collecter des fonds à la demande de Malcolm. Il a alors tenté de rentrer dans la salle, mais a dû reculer devant la ruée des gens cherchant à fuir. Lorsqu’il parvient finalement à accéder à la scène, la chemise de Malcolm est ouverte, son torse couvert de sang. Grant sort son appareil et prend les photos qui seront les principales images de la mort de Malcolm X. [23]

Lorsque Herman Ferguson réussit enfin à atteindre l’entrée principale de l’Audubon, il aperçoit sur sa droite « une grande agitation dans la rue [où] la foule de gens s’est saisi d’un homme qu’elle secoue dans tous les sens ». Encore sous le choc, Ferguson s’éloigne jusqu’au croisement de Broadway et de la 166e Rue Ouest en ressassant « ce qu[’il venait] de voir – la mort de Malcolm ». Quelques minutes plus tard, il voit des frères de la MMI et l’OAAU se précipiter en poussant un brancard à l’intérieur du bâtiment. Très rapidement, un groupe de policiers et de militants ressort avec le brancard transportant un visage familier :

«J’ai regardé Malcolm. J’ai tout de suite remarqué son teint blafard, grisâtre. […] Sa chemise était ouverte et sa cravate desserrée. On pouvait voir sa poitrine [et] l’impact de quelque sept balles, des trous suffisamment larges pour y mettre le petit doigt. J’ai alors [pensé] qu’il nous avait quittés.» [24]

Désorienté, Ferguson reste planté au croisement pendant quelques minutes, sans pouvoir se décider sur quoi faire. C’est à ce moment-là qu’une voiture de police filant vers le nord sur Broadway tourne brusquement et s’arrête à quelques mètres de lui. La voiture est occupée par deux policiers, dont l’un d’eux, pense-t-il, est une « huile » au regard des « ficelles qu’il porte sur sa casquette ». [25] L’officier entre dans l’Audubon dont il ressort un moment plus tard avec un homme au teint olivâtre qui « à l’évidence souffrait énormément ». Alors qu’on aide l’homme à s’asseoir à l’arrière du véhicule, Ferguson se dirige vers celui-ci : « Il était effondré et se tenait le ventre, et j’ai dû me pencher pour voir son visage. » Pensant qu’on lui a tiré dessus et que le blessé est « un de nos gars », Ferguson demande ce qu’il se passe. La voiture de police repart à toute vitesse, mais au lieu de tourner à droite pour traverser Broadway vers l’hôpital le plus proche, le Columbia Presbyterian, « elle descend vers le fleuve [Hudson], de l’autre côté de la rue, suit cette direction et disparaît hors de ma vue ».

Quand les militants de la MMI et de l’OAAU survoltés et la police arrivent avec Malcolm aux urgences du Columbia Presbyterian, le médecin pratique immédiatement une trachéotomie afin de le ramener à la vie. Malcolm est ensuite transporté au deuxième étage de l’hôpital où d’autres médecins tentent à leur tour de le réanimer. Ils savent que Malcolm était probablement déjà mort au moment de son arrivée aux urgences, mais persistent à tenter de le sauver pendant un quart d’heure avant d’abandonner. À 15 h 30, dans un petit bureau plein à craquer de partisans de Malcolm et d’un nombre croissant de journalistes, un médecin annonce avec détachement : « L’homme connu sous le nom de Malcolm X est mort . » [26]

Les principaux lieutenants de Malcolm, Mitchell, Benjamin 2X et James 67X, n’ont pas été personnellement témoins de la fusillade, tous trois dans les coulisses. « J’ai entendu du bruit, comme des pétards, se souvient Benjamin. J’ai entendu des détonations [et] la sueur est sortie par tous les pores de ma peau. J’ai compris qu’il nous avait quittés. » Benjamin avait essayé de se lever, mais cela lui fut physiquement impossible :

«Je suis resté assis, accablé, en fixant son cadavre à travers la porte ouverte sur la scène. […] Puis, brusquement, le poids que j’avais sur les épaules est parti et je me suis senti soulagé. Malcolm avait fini de souffrir. La mort arrive toujours au moment propice. Quels que puissent être les moyens par lesquels elle arrive, quand elle arrive, elle arrive à son heure.» [27]

Sara Mitchell est frappée par le comportement des disciples de Malcolm regroupés autour de son corps : « « Peut-être qu’il va y arriver », se disaient-ils en s’adressant aussi à Betty. Et tous ensemble, ils l’ont supplié et imploré de revenir à la vie. » Plus tard, elle constatera amèrement qu’« après que les tirs ont cessé, de longues et terribles minutes se sont écoulées sans qu’il y ait le moindre policier sur la scène ». Bien qu’un des principaux centres médicaux de la ville ne soit qu’à quelques blocs, aucune ambulance n’est arrivée à l’Audubon, ce qui explique pourquoi ce sont les propres amis de Malcolm qui ont dû se précipiter aux urgences pour y prendre une civière. Plusieurs femmes « ont conduit une [Betty] hébétée à l’extérieur et ont rassemblé ses quatre petites filles pour les ramener chez elles. Ce n’est qu’à ce moment que la police est arrivée ». Quand la police finit par faire son entrée, les membres de la MMI et de l’OAAU sont furieux. « Elle est arrivée ridiculement tard », raconte Mitchell qui se souvient qu’« une femme en larmes a hurlé en agitant les mains : « Ne vous pressez pas, revenez demain » ! ». [28]

Quand les coups de feu ont claqué, se souvient James 67X, Benjamin […] s’est jeté sur le plancher. Ensuite, je suis sorti. […] Les gens étaient sur la scène, Malcolm gisait à terre et j’ai vu la vie le quitter. [29]

Une photo prise immédiatement après l’assassinat montre James agenouillé près de Malcolm, qui semble retirer quelque chose du corps. Puis, de façon inexplicable, sans donner d’instructions à ses subordonnés ni prendre en main le commandement, il traverse rapidement la foule désorientée, passe devant les policiers qui arrivent et quitte l’immeuble. Des années plus tard, James 67X expliquera que sa première intention a été « de tuer [le capitaine] Joseph » en représailles. [30]

 

Source: https://www.revolutionpermanente.fr/Il-y-a-54-ans-Malcolm-X-etait-assassine-Recit-de-cette-journee

Un groupe d’extrême-droite a parlé de la mise en scène d’une « fausse » attaque terroriste pour effrayer les Québécois

iTraduction d’un article du journal « The Gazette » sur l’extrême-droite au Québec

 

 

De nombreuses actions sont à venir « , explique le journal dans un journal de discussion privé obtenu par la Gazette de Montréal. La police a été alertée.

Un homme ayant des liens avec les groupes d’extrême droite québécois a discuté de la mise en scène d’un faux attentat terroriste pour «réveiller» les habitants de la province et a encouragé ses pairs à commencer à s’entraîner avec des armes à feu.

Dans un journal de bord privé obtenu par la Gazette de Montréal, un homme qui s’appelait Phénix le Patriote écrivait qu ‘«il devrait y avoir une fausse tentative terroriste» pour «effrayer les Québécois».

 

Il a suivi le post en ajoutant: « Ne vous inquiétez pas… de nombreuses actions sont à venir. »

Phénix a également partagé une image de cibles sur lesquelles il avait tiré avec un pistolet de 9 mm et de calibre .22 dans un champ de tir à Joliette. A côté de l’image, datée du 22 janvier 2018, il a ajouté la légende: «Faites comme mes frères. »

Ce commentaire a reçu la réponse suivante: «Excellent travail, Patriote. Gardez votre objectif vrai »d’un autre membre du chat privé.

 

Les grumes appartiennent à un groupe d’extrême droite qui s’appelle Patriotes du Québec et comprend des membres de Storm Alliance, Le Front Patriotique du Québec et Atalante Québec.

L’activiste qui a découvert les journaux de conversation en ligne les a partagés avec la Sûreté du Québec en janvier dernier, ainsi que des preuves suggérant que Phénix pourrait être un membre du groupe de droite La Meute.

«Phénix n’est pas le type de personne que nous recherchons en tant que membre, a déclaré le porte-parole de La Meute, Sylvain Brouillette. «Les Patriotes (groupe en ligne) n’ont rien à voir avec La Meute. Il y a vraiment une tension entre nous.  »

Un représentant de Storm Alliance a nié avoir eu connaissance du groupe de discussion.

La SQ a reçu la plainte l’hiver dernier et a transmis l’information à une unité d’enquête sur les groupes de haine, selon une source policière.

« Nous ne pouvons commenter ce groupe en particulier, mais nous surveillons l’extrémisme de tous les côtés pour activité criminelle », a déclaré le lieutenant Hugo Fournier de la SQ. « Mais encore une fois, nous ne pouvons rien confirmer ou nier à propos de ce groupe. »

Un inspecteur de la police de Montréal a déclaré que les gens devraient signaler ces types d’incidents aux forces de l’ordre.

«C’est un acte criminel d’encourager les autres à commettre des actes de violence», a déclaré Line Lemay, lieutenant-détective du groupe de travail du département sur les crimes motivés par la haine. «Vous ne voulez pas que quelque chose de terrible se produise et, après coup, vous entendez dire à quel point tous ces signes étaient présents.

«Le simple fait de signaler une personne ne signifie pas que nous la traiterons comme un criminel. Souvent, il suffit de contacter la personne et de lui faire savoir que ses paroles ont des conséquences.  »

Un expert en matière de lutte contre la radicalisation a déclaré à la Gazette qu’il était «extrêmement préoccupé» par les messages de Phénix.

«Quelqu’un qui dit ces choses – en public ou en privé – est clairement dans un état d’esprit dangereux», a déclaré Maxime Fiset, coordinateur de projet du Centre pour la prévention de la radicalisation menant à la violence. « Les gens autour de lui devraient appeler la police pour s’assurer que ces mots ne sont pas accompagnés d’action. »

Bien qu’il soit difficile d’évaluer la gravité des messages, M. Fiset explique que les images de la pratique de la cible utilisée par Phénix suggèrent qu’il peut avoir les moyens de commettre un acte violent. Il a ajouté qu’il est troublant de ne voir aucun des autres membres du groupe le défier pour ses idées extrémistes.

«Lorsque personne ne vous décourage, lorsque les échanges ne font que s’intensifier, l’idée de la violence dans le monde réel se normalise», a déclaré Fiset. « Et il devient possible pour lui de commettre un acte violent. »

L’un des associés de Phénix, dans les discussions, porte le nom d’utilisateur Heinrich Himmler – une référence au commandant nazi qui a dirigé le meurtre de 6 millions de Juifs pendant l’Holocauste.

Les personnes qui publient des commentaires haineux ou extrémistes en ligne sont souvent isolées, en colère et souffrent de maladie mentale, selon Lemay.

«Ils prennent souvent la colère à propos de tout ce qui ne va pas dans leur vie et ils ciblent les immigrants ou un groupe de personnes avec cette colère», a-t-elle déclaré. «Notre travail consiste à évaluer la gravité de la menace et parfois simplement à mettre les personnes en contact avec des services de santé mentale, une clinique locale et tout simplement à la racine du problème. »

Lorsque la police intervient, elle peut saisir le Centre de prévention de la radicalisation menant à la violence.

 

Source: https://montrealgazette.com/news/local-news/far-right-group-spoke-of-staging-fake-terrorist-attack-in-quebec

 

Action publique politico-artistique à Montréal afin de dénoncer l’assassinat par les forces policières chiliennes du jeune mapuche Camilo Catrillanca

 

Quand : Samedi 24 novembre, 12h00 pm

Où : Parc des Amériques, Boulevard Saint-Laurent coin Rachel Est,
Montréal, Canada

 

Ce samedi, un rassemblement sous forme de performance artistique, en appui au peuple Mapuche aura lieu afin de  dénoncer l’assassinat de Camilo Catrillanca, jeune mapuche de 24 ans, par le Commando Jungla, groupe paramilitaire créé par le Gouvernement du président chilien Sebastian Piñera pour réprimer les Mapuche.

En territoire Mapuche ou Wallmapu, l’État et ses forces spéciales
agissent dans la  répression, la criminalisation et la persécution.
Leurs opérations ont causé plusieurs morts et des dizaines de
prisonnier.ère.s politiques mapuche condamné.e.s injustement et sansfondement par la loi Anti-terroriste, créée par Augusto Pinochet
durant la dictature. Cette loi anti-terroriste, tout comme la Loi sur
les renseignements, sont des outils de répression et de
criminalisation des peuples autochtones se trouvant sur leurs
territoires ancestraux.

 

Camilo Catrillanca a été tué par balles par un commando lourdement armé, alors qu’il se trouvait sur son tracteur etrevenait de ses labeurs agricoles. Les autorités prétendent que ce commando muni d’armes de guerre enquêtait sur des vols de voiture dans la zone.

Les lois répressives qui cherchent à légitimer cette violence
sont en train de détruire un peuple qui a refusé de se soumettre. Les
mapuches continuent dans leur lutte de revendication de leur
territoire, en dépit de la militarisation présente dans toute la
région qui cherche à protéger les intérêts du secteur privé.

Ce rassemblement se fait en solidarité avec la lutte légitime du
peuple Mapuche pour la récupération de leurs territoires ancestraux.

Contact média :

En français : Amelia Orellana (438) 827-0656

 

Abattre le capitalisme

construire la solidarité 

Sur la situation actuelle des Ouïghours en République « populaire » de Chine

 

Il règne en ce moment même au Xinjiang, parfois appelé également « Turkestan oriental chinois », territoire du Peuple ouïghour, une situation visiblement tragique sur laquelle (par contraste « étonnant » avec le Tibet du « gentil » Dalaï-Lama ex-esclavagiste féodal et réactionnaire comme pas deux, mais coqueluche de tous les bobos occidentaux de merde bouffeurs de quinoa) plane un assez lourd silence radio des médias mainstream, mis à part quelques articles dans la presse conservatrice-atlantiste (Figaro, Atlantico) ou libérale-libertaire (Libé, Nouvel Obs) la plus anti-chinoise (dont la sinophobie, disons, parvient à compenser et même par moment surpasser l’islamophobie)…

Il faut dire que les cibles, ici, sont des MUSULMAN-E-S ; raison pour laquelle c’est d’abord par les médias dits (en bon langage républicain) « communautaires », ou les publications de la mouvance décoloniale sur les réseaux sociaux, que nous parvient l’information.

Tâchons en quelques points d’y voir clair.

– L’État chinois vient donc d’admettre (précisément, d’avaliser par une loi du 9 octobre), après plusieurs années de dénégations ou du moins de justifications alambiquées, avoir procédé à « l’internement » pour « rééducation » de plusieurs centaines de milliers, peut-être 1 million de Ouïghours (qui seraient un peu plus de 10 millions) ; « rééducation » visant à lutter contre ce que l’on appellerait ici la « radicalisation islamiste », mais qui dans les fait, consiste à imposer par matraquage une allégeance « patriotique » à Pékin et à anéantir des pratiques culturelles faisant partie intégrante de leur identité et de leur conscience nationale – manger halal, pas de porc ni d’alcool, prière, jeûne du ramadan etc. etc. :

Cette province autonome (effectivement, sur le papier constitutionnel, autonome contrairement à nos peuples prisonniers et dernières colonies directes de l’État français) de la République « populaire » est en réalité sous état d’exception depuis pratiquement une dizaine d’années (ou un gros quart de siècle mais surtout une dizaine d’années), après que la résistance nationale ouïghoure face à la botte de l’État central et à la colonisation de peuplement (contrairement aux mythes répandus au sujet du Tibet, toujours peuplé à 92% de Tibétains, il y a bien une minorité – 45% – de Ouïghours au Xinjiang, face à quelques 41% des Chinois han et 14% d’autres nationalités – pour la plupart apparentées, Kazakhs, Kirghizes, Huis etc.*) ait évolué vers une lutte armée (attentats, émeutes etc.) se revendiquant généralement de la foi islamique et parfois du djihad (quelques dizaines, à la rigueur centaines d’Ouïghours seraient par ailleurs effectivement engagés dans des organisations dites djihadistes sur d’autres fronts de la planète).

 

http://ekladata.com/chine-repression-ouighours.pdf

[* Il convient de préciser à ce titre (sinisation-du-xinjiang) que contrairement au Tibet, toujours vassal de l’Empire chinois mais relativement isolé sur ses hauts plateaux, le Xinjiang qui consistait ni plus ni moins qu’en la Route de la Soie a de très longue date connu une importante présence chinoise (nullement liée donc à l’horrible « communiiiisme »), qui pouvait s’élever au tiers de la population totale à la fin de l’Empire (vers 1910) avant de tomber à 6% en 1949 (après 3 décennies et demi de total effondrement intérieur de la Chine et donc de « rapatriement » des marchands, militaires, fonctionnaires etc.), puis de remonter à la proportion d’un tiers à l’époque de la Révolution culturelle – par ailleurs, comme pour toute province de tout grand État industrialisé en tant qu' »enclos à force de travail », on trouve également et de plus en plus (surtout depuis environ 40 ans de développement économique à tout crin dans l' »économie socialiste de marché ») des Ouïghours hors du Xinjiang, concrètement, comme migrants de travail.]

– Il apparaît cependant que les choses n’ont pas toujours été ainsi, et clairement pas sous Mao ni même jusqu’en 1989, date de la terrible répression du « Printemps de Pékin » (que l’on peut considérer comme le moment du triomphe total du capitalisme en Chine, dans la perspective de devenir un pays impérialiste). C’est particulièrement important à rappeler, car si un intérêt pouvait exister pour les médias de l’impérialisme (prenant le risque de paraître « pro-islamistes » aux yeux d’une partie de leur lectorat…) de mettre en avant cette terrible persécution, ce serait celui-là : semer la confusion régime chinois actuel = « communisme » et jeter encore de l’huile sur le feu, creuser encore le fossé entre les forces essentielles pour la lutte anti-impérialiste mondiale que sont les révolutionnaires marxistes d’un côté et la résistance nationale des peuples majoritairement musulmans de l’autre.

Pour toute analyse marxiste sérieuse et digne de ce nom, la Chine ultra-capitaliste actuelle (et depuis près de 40 ans) n’a absolument rien de « socialiste » ni de « marxiste » sinon dans le décorum (servant d’équivalent pour sa « révolution industrielle » d’un – disons – régime bonapartiste autoritaire) ; de notre point de vue maoïste, la contre-révolution des tenants de la « voie capitaliste » y a été opérée sous la conduite de Deng Xiaoping dans les années suivant la mort de Mao (1976, jusqu’à disons la dernière Constitution promulguée en 1982).

– Selon le quotidien Libération, certes né maoïste dans les années 1970 mais n’ayant plus grand-chose aujourd’hui (ni depuis longtemps), loin de là, de fanatiquement pro-Pékin, « le Xinjiang a longtemps été un monde à part exempté de la politique de l’enfant unique, où se pratiquait un islam ancien et modéré (sic… toujours le besoin d’insister sur ce genre de truc, enfin bref) à 3 000 kilomètres de Pékin. Le ouïghour, langue apparentée au turc et qui s’écrit en caractères arabes, était pratiqué partout, le mandarin ne s’apprenait qu’au collège deux heures par semaine. Les fonctionnaires chinois d’ethnie han étaient rares et discrets. «Mais après la révolte de 1989 et la chute de l’URSS, le Parti communiste chinois a craint que le Turkestan oriental ne fasse sécession. Il a entamé une politique dite d’assimilation, qui est en fait une destruction de notre culture, de notre langue, de notre identité religieuse»,explique le juriste Mehmet Tohti, cofondateur de l’association Congrès mondial ouïghour. »

https://www.liberation.fr/planete/2018/08/29/ouighours-les-camps-secrets-du-regime-chinois_1675335

Ensuite de quoi, « les émeutes de 2009 et une série d’attentats qui ont fait plus d’une centaine de victimes, et l’enrôlement de dizaines de Ouïghours dans les rangs de l’État islamique en Syrie ont renforcé la répression »…

Il n’y a donc aucune difficulté à imaginer que le régime chinois, toujours fin stratège, ait su profiter du climat mondial actuel pour associer lutte contre le « terrorisme » (avec cette résistance ouïghoure de tendance parfois djihadiste) et renforcement de sa mainmise sur cet immense territoire (3 fois l’Hexagone !) que l’on sait regorger de ressources indispensables à sa position mondiale de nouvel impérialisme concurrent de l’Occident ; en s’attaquant à travers « l’extrémisme religieux » (soigneusement « confondu » avec) à ce qui forme en réalité l’avant-garde de sa conscience, et donc de sa RÉSISTANCE nationale.

– MAIS PAR CONTRE, à partir de là, on ne peut qu’inviter le lecteur ou la lectrice à une certaine prudence, un certain recul critique par rapport à TOUT ce qui se dit ; non pas forcément quant à la réalité des faits, mais peut-être par rapport à certaines possibles exagérations ; surtout émanant de « sources » telles que Free Asia (née contre la Chine révolutionnaire de Mao, mais toujours active contre le – désormais – concurrent impérialiste chinois de l’Occident), ou encore les médias des pays pétro-wahhabites du Golfe.

Il faut avoir à l’esprit par exemple, sans nier le fond de réalité de l’oppression du Tibet, y compris parfois sous Mao (où les tendances droitistes tendant déjà à voir les « provinces reculées » comme des colonies pour le futur capitalisme chinois, comme les tendances gauchistes aux exactions « civilisatrices » contre les « peuples arriérés », existaient dans le Parti et l’appareil d’État un peu comme ici sous la Révolution bourgeoise), ce que l’on peut ou a pu entendre au sujet du « génocide tibétain » ; en termes d’allégations ne tenant pas debout comme par exemple « 1,2 million de morts depuis 1950 » (population à l’époque… 1,2 million justement ; aujourd’hui 3,3 millions pour la province autonome, à 93% de nationalité tibétaine contrairement aux allégations de « majorité chinoise désormais » ce qui n’est même pas vrai à Lhassa – 82% de Tibétains ; 6,5 millions en ajoutant ceux des provinces limitrophes où ils sont effectivement minoritaires, mais reconnus comme nationalité dans les districts où ils vivent en majorité ; vous imaginez alors, un peu, les proportions délirantes et contraires à tout bon sens démographique attribuées à ce prétendu « génocide » ; etc. etc.).

À cet épineux sujet, assez central dans l’anticommunisme de gôôôche bobo-socedem, libéral-libertaire, mais aussi fréquemment brandi par les gauchistes (anars, trotskystes etc.) toujours friands de génocides chez les autres (et moins volubiles s’agissant des crimes contre l’humanité sur lesquels se sont construits leurs propres États bourgeois), l’on peut lire notamment les papiers de l’excellent Domenico Losurdo : la-chine-le-tibet-et-le-dalai-lama – le-tibet-l-imperialisme-et-la-lutte-entre-progres-et-reaction

– La position de la Turquie d’Erdogan (le Peuple ouïghour étant musulman mais aussi turcophone…) sur la question tend ces dernières années à évoluer vers un certain silence, ou au « mieux » à se payer purement de mots. Il faut dire que depuis 2016, face au soutien occidental à Rojava, aux suspicions envers l’Occident d’être derrière la tentative de coup d’État « güleniste » de cette année-là et (quoi qu’il en soit) aux condamnations par celui-ci des purges qui ont suivi, le régime AKP d’Ankara a eu tendance à se rapprocher grandement du bloc impérialiste « oriental » russo-chinois ; la Chine étant notamment son principal appui dans la perspective de rejoindre les fameux BRICS turquie-brics.pdf (qui deviendraient alors BRICST, ou peut-être simplement « RICST » vu qu’avec le coup de barre fasciste pro-occidental au Brésil, voilà…), ce qui dans un contexte de véritable guerre monétaire que lui livre Washington (pas au niveau du Venezuela certes, mais un peu quand même) lui donnerait accès à la Nouvelle Banque de Développement réservée aux membres du « club » (et dont heureusement le siège a été fixé à Shanghai en Chine, parce que si c’était au Brésil comme envisagé à un moment, voilà quoi…).

Ainsi, en dépit du fait qu’historiquement (y compris du temps du kémalisme et de Mao…) le nationalisme ouïghour est très lié à l’État turc et à ses discours pantouraniens, on ne voit pas en ce moment le « Sultan » particulièrement « en pointe » sur ce dossier…

EN RÉSUMÉ :

– La Chine utilise sans l’ombre d’un doute le prétexte, bien dans l’air du temps, d’une « campagne anti-terroriste » (anti-terrorisme « islamiiiiste ») pour, EN CONTOURNANT sa propre Constitution qui accorde (sur le papier) aux nationalités périphériques de la République « populaire » une reconnaissance nationale et une autonomie politique dont les peuples niés et les dernières colonies des États européens n’oseraient rêver (car sinon… pourquoi y aurait-il besoin d’un tel prétexte ?), asseoir sa mainmise sur le Xinjiang comme « colonie intérieure » au service de sa « volonté de puissance » impérialiste en brisant préventivement toute velléité de résistance nationale ouïghoure ; et en se « garantissant » (relativement) en cela un silence « gêné » des Occidentaux qui risqueraient, en montant au créneau, de se mettre en porte-à-faux vis-à-vis des discours anti-« islamiiiiistes » dont ils abreuvent quotidiennement leurs « opinions ».

– SOLIDARITÉ avec le Peuple ouïghour persécuté par l’État contre-révolutionnaire, « social »-FASCISTE chinois. D’un bout à l’autre de la planète, sans JAMAIS de « bon » ni de « mauvais » oppresseur, LE CAMP DES PEUPLES EST NOTRE CAMP.

– Mais dans le contexte actuel, à ne jamais perdre de vue, d’accélération de la Quatrième Guerre mondiale non-déclarée en cours depuis la fin de la Troisième (la Guerre froide) ; avec une Chine rivale capitaliste-impérialiste de l’Occident ; attention à une trop soudaine mobilisation médiatique, de trop soudaines et abondantes larmes de crocodiles des médias mainstream occidentaux à ce sujet. ÉVITER de se faire hâtivement mobiliser par un camp impérialiste (l’Occident) contre un autre (la Chine).

Qui irait par exemple, en Syrie du Nord, dénier le droit aux Kurdes de faire face à des gens qui, quelles que soient les (même excellentes) raisons de la haine qui les anime, les considèrent comme des « impies » et des « satanistes » et leurs réservent le sort adéquat ; tout en en profitant pour desserrer un peu l’étouffant étau « jacobin » arabiste pesant sur eux depuis 7 décennies, et se constituer une base arrière contre l’État turc qui les piétine depuis près d’un siècle ? Pour autant, on a hélas vu comment cette belle cause a malheureusement tourné – ou plutôt été détournée…

Et il peut en être absolument de même avec toutes les plus JUSTES causes de la planète, tant l’impérialisme, les impérialismeS dont il ne faut pas oublier la pluralité et la lutte entre eux, sont capables en la matière de tous les opportunismes.

On a cité les Kurdes de Rojava ; on pourrait encore rappeler comment avec des individus comme Soral ou Chatillon, la Palestine elle-même, la résistance antisioniste du Machrek arabe peut être mobilisée au service d’une certaine vision, ou du moins « proposition » géopolitique adressée à l’impérialisme français… Dès l’époque de la Première Guerre mondiale, les Irlandais récupérés par l’impérialisme allemand contre l’Empire britannique ; les Arméniens, les Grecs, les chrétiens d’Orient et les Arabes récupérés par le bloc France-Angleterre-Russie pour dépecer l’Empire ottoman allié de l’Allemagne, etc. etc.

Pour simple rappel : au nombre d’une dizaine de millions, les Ouïghours persécutés représentent quelque chose comme 0,6% des musulmans de la planète. Tout comme les 16 millions habitant la Fédération de Russie, et donc potentiellement victimes de ses répressions, en représentent autour d’1%. La quasi totalité des autres (plus de) 98% sont, quant à eux, bel et bien principalement la proie de l’Occident, en Palestine, en Afghanistan et ailleurs ; et c’est sans compter les milliards de damnés de la terre non-musulmans…

Mais c’est sûr, il n’est de « bonne » indignation que sélective et les persécutions, les massacres, les crimes contre l’humanité c’est toujours « mieux », plus commode à dénoncer lorsque c’est chez les autres ; surtout lorsque c’est (pour parler clairement) entre « barbares », entre non-Blancs !

Il ne faut pas verser dans le campisme, dans une lecture purement géopolitique du monde et nier l’oppression de ceux dont l’oppresseur est supposément dans le « bon » camp ; comme l’aurait sans doute fait ici le (malgré tout regretté) Losurdo, ou comme ceux qui soutenaient les soulèvements arabes jusqu’à ce que leur onde de choc atteigne les rivages de la Syrie « anti-impérialiste » ; attribuant dès lors toute juste résistance populaire contre l’oppression à la « Main de l’Empire » ; MAIS il faut bien évidemment toujours garder ce genre de facteurs à l’esprit pour que, comme disait Lénine, « le fait que les directions (des) mouvements (de résistance/libération nationale) pourraient les trahir en les associant politiquement et administrativement à l’impérialisme (puisse être) une raison de dénoncer leurs chefs » (et de ne pas se laisser embrigader dans des campagnes de propagande impérialiste au service de la guerre mondiale non-déclarée, etc.), « mais pas de condamner ces mouvements (la « raison de se révolter » qui les porte) en tant que tels ».

Source : http://servirlepeupleservirlepeuple.eklablog.com/sur-la-situation-actuelle-des-ouighours-en-republique-populaire-de-chi-a148912294

Manifestations antiracistes et antifa à Montréal

Près de 300 membres des groupes La Meute et Storm Alliance ont manifesté dimanche après-midi au centre-ville de Montréal contre ce qu’ils nomment« l’immigration irrégulière ». Au même moment, environ 200 militant.e.s de « gauche » qui s’étaient rassemblé.e.s à la Place Valois dans le quartier Hochelaga se joignent au point de rassemblement du centre-ville de Montréal des groupes d’extrême-droite pour dénoncer cette prise de position qu’ils qualifient de «discours haineux» et essaient de confronter les racistes.

Ils sont cependant restés à l’écart, alors qu’une importante surveillance policière est sur place pour ériger des périmètres de sécurité et empêcher que les deux manifestations en viennent à s’affronter directement.

Peu après 14 h, le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) indiquait que la manifestation se déroulait bien, qu’elle maîtrisait la situation : pas de casse ni de débordements. Le SPVM n’a pas voulu préciser le nombre d’agents sur place pour surveiller l’événement.

La Ville de Montréal « très préoccupée »

Du côté de la Ville de Montréal, le conseiller Alex Norris, qui est aussi président de la Commission de la sécurité publique, indiquait mardi que « même l’extrême droite a le droit de s’exprimer, pourvu que ça ne sombre pas dans la promotion de la haine et des crimes haineux ».

Au cours de cette même réunion publique, la responsable de la sécurité au sein de l’administration de Valérie Plante, Nathalie Goulet, s’est quant à elle dite « très préoccupée par les manifestations d’extrême droite qu’on voit arriver à Montréal ».

« Mettre dos à dos l’idéologie raciste, homophobe, sexiste des groupes d’extrême droite et les antifascistes, ce n’est pas une solution. Ce n’est pas du tout la même chose », a-t-elle déclaré.

« Vouloir protéger les deux groupes, pour moi, ce n’est pas une stratégie de contrôle de foule qui est possible à terme », a-t-elle ajouté.

Une caravane de bienvenue

Des militant.e.s soutenant les demandeurs d’asile étaient à la tête d’une caravane, dimanche, à la frontière canadienne à Saint-Bernard-de-Lacolle. Celle-ci sera présente durant trois jours, dans le but d’indiquer aux migrants qu’ils sont les bienvenus au Canada. Les militants de la caravane comptent également sensibiliser les citoyens des municipalités des alentours à la réalité de ces personnes à la recherche d’une terre d’accueil.

 

Contre-manifestation « antiraciste »

Romina Hernandez, membre de Solidarité sans frontières, explique pourquoi elle participe à cette manifestation. « Nous, je pense qu’on n’est pas intolérants. En fait, ce qu’on dit, c’est qu’on soulève la question qu’il y a du racisme, du racisme systémique évidemment. Mais aussi avec les regroupements comme La Meute, c’est un racisme qui est direct et concret. »

« Nos ancêtres ont combattu les gens qui avaient des idées fascistes, racistes et je dirais même nationalistes. Je pense qu’aujourd’hui c’est notre devoir d’arrêter les gens qui vont avoir un discours [haineux] », affirme un manifestant pro-tolérance et inclusion.

Une autre marche « antiraciste » est aussi attendue à la tombée de la nuit, à 21 h, avec comme point de départ la place Émilie-Gamelin.

 

Abattre le capitalisme

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Poursuite contre le policier Lapointe : la famille Villanueva à nouveau débouté

Face à la répression, la solidarité est notre arme!

 

 

La Cour supérieure a encore une fois fermé la porte à ce que le policier qui a tué le jeune Fredy Villanueva en 2008 soit accusé au criminel. La décision a été rendue ce matin par la juge Hélène Di Salvo au palais de justice de Montréal.

La Coalition contre la répression et les abus policiers (CRAP) avait déposé une requête pour que les tribunaux autorisent une plainte privée contre Jean-Loup Lapointe.

La CRAP a tenté en vain de faire casser un jugement du printemps dernier qui a tranché en faveur du policier de Montréal.

Fredy Villanueva, 18 ans, est tombé sous les balles du policier Lapointe le 9 août 2008, dans un parc de l’arrondissement de Montréal-Nord. L’opération visait à arrêter le grand frère du jeune homme, Dany Villanueva.

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L’affaire Villanueva en bref: http://ici.radio-canada.ca/nouvelle/646406/villanueva-mort-manifestations-enquete-publique-rapport-coroner 

 

 

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Source: http://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1069106/clan-fredy-villanueva-deboute-cour-superieure-policier-lapointe

Manifestation antifa et antiraciste de Montréal pour s’opposer à la montée de l’extrême-droite

Les manifestantEs, estiméEs à environ 5 000 par les organisateursTRICES, ont marché dans les rues de Montréal ce dimanche 12 novembre pour s’opposer à la haine, au racisme, à l’extrême droite et à la loi sur la neutralité religieuse.

Réunis à la place Émilie-Gamelin, les marcheurs se sont rendus à la Place du Canada, au centre-ville, où la statue de l’ancien premier ministre du Canada John A. Macdonald et « Père de la Confédération canadienne » (1867) a été aspergée de peinture rouge dans la nuit de samedi à dimanche. Un groupe « antiraciste et anticolonialiste », déclarant ne pas faire partie de l’organisation de la marche, a revendiqué le coup d’éclat. L’un des Pères de la Confédération aurait été, selon eux, un « raciste ».

Par cette manifestation, les organisateurs visaient notamment les groupes ultranationalistes, tels que La Meute, et l’adoption de la loi 62 sur la neutralité religieuse, qui impose de donner et recevoir des services à visage découvert.

Des slogans ont également été scandés, notamment ceux-ci:  SoSoSo solidarité avec avec la Palestine; Make racist afraid again; un peuple uni jamais ne sera vaincu; un peuple armé jamais ne sera vaincu; À qui la rue, À nous la rue!

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La reconnaissance des droits ancestraux des peuples autochtones doit avoir préséance par Pauline Easton

Les robes rouges suspendues dans le parc mémorial Lheidli T’enneh à Prince George le 17 septembre symbolisent les femmes et filles autochtones qui ont été assassinées ou qui sont disparues sur la Route des larmes et toutes les femmes et filles autochtones disparues et assassinées. (LML)

 

 

Le Marxiste-Léniniste Numéro 39 – 3 octobre 2017

 

Le sort réservé aux peuples autochtones de ce pays est un sujet de grande préoccupation pour tous. Cela comprend le gouvernement Trudeau. Malheureusement, la préoccupation de ce dernier n’est pas de redresser les torts historiques comme l’exige notre époque mais de réaliser ce que les gouvernements précédents n’ont pu réaliser, soit éliminer une fois pour toutes les droits autochtones pour pouvoir piller leurs terres et leurs ressources. Le premier ministre Justin Trudeau se préoccupe davantage de redorer l’image ternie du Canada à l’échelle mondiale en ce qui a trait aux droits humains, le Canada ayant acquis une réputation de violateur des droits humains à cause de sa négligence criminelle historique face aux conditions de vie des peuples autochtones et des crimes commis contre eux.

 

C’est surtout l’image du Canada qui préoccupait le premier ministre lorsqu’il s’est adressé à l’Assemblée générale de l’ONU le 21 septembre. Posant en homme d’État chevronné bien qu’il ne soit en fonction que depuis deux ans, Justin Trudeau a dit : « Dans les conversations que j’ai eues au cours des années lorsque j’ai suggéré que certains pays doivent mieux faire sur la question des droits de l’homme et leurs propres défis internes, la réponse a été : ‘Eh bien, parlez-moi du triste sort réservé aux peuples autochtones (au Canada)’. »
Quelques jours auparavant, le Comité des Nations unies pour l’élimination de la discrimination raciale (CÉDR) a publié un autre rapport qui critique sévèrement le Canada parce qu’il ne s’attaque pas à la situation grave à laquelle sont confrontés ses peuples autochtones. Trudeau a profité de son passage à l’ONU pour blâmer les gouvernements précédents et laisser entendre qu’on peut compter sur son gouvernement pour changer cette situation.

Les gouvernements précédents ont « rejeté la protection du territoire et des eaux préconisée par les autochtones : le principe de penser toujours aux sept prochaines générations » et en faisant cela « nous avons, dans le passé, rejeté l’idée même que des générations entières d’autochtones puissent se définir et vivre dans la dignité et la fierté qui leur sont dues, a-t-il dit. L’incapacité des gouvernements canadiens successifs à respecter les droits des autochtones au Canada nous fait grandement honte. »

« Nous le savons que le monde entier s’attend à ce que le Canada adhère scrupuleusement aux normes internationales en matière de droits de la personne — y compris à la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones — et c’est aussi ce que nous exigeons de nous-mêmes », a-t-il ajouté.

Diversion et duperie

Tout cela est de la poudre aux yeux. Non seulement le bilan de son gouvernement est-il similaire à celui de ses prédécesseurs, mais il comprend une dose beaucoup plus grande de diversion et de duperie avec la prétention qu’il va rétablir des relations de nation à nation. Un gouvernement ne peut pas descendre plus bas que cela à continuer de priver le peuple de son droit légitime à sa terre et à ses ressources et à empêcher que les torts historiques soient réparés et que justice soit faite.

 

« Nous travaillons de près avec les peuples autochtones au Canada pour mieux répondre à leurs priorités, mieux comprendre ce que l’autodétermination signifie pour eux et soutenir leurs efforts pour rebâtir leurs nations », a déclaré Trudeau devant l’Assemblée générale des Nations unies.

Depuis la Confédération il y a 150 ans et même avant, les gouvernements du Canada ont tenté d’éteindre les droits ancestraux des peuples autochtones et leur droit d’être. Cela équivaut à les éteindre comme peuples. La duperie de Trudeau et de ses ministres ne changera pas le fond du problème. Le premier ministre a maintenant créé un deuxième ministère des Affaires indiennes. Il a dans son conseil des ministres une procureure générale qui se revendique d’ascendance autochtone et qui parle de « nous » quand elle se réfère à l’objectif de son gouvernement de déposséder une fois encore les nations autochtones. Et maintenant le premier ministre parle d’abolir la détestée la Loi sur les Indiens sans tout d’abord reconnaître les droits ancestraux dans la loi.

Le rôle de l’État dans le camouflage des raisons pour lesquelles tant de femmes et de filles autochtones ont disparu demeure le sujet tabou que le gouvernement fait tout pour éviter. Les conseils de bande qui refusent de coopérer sont criminalisés, tandis que les gouvernements et les médias monopolisés nous disent que les Indiens ont le droit de parler et de protester mais dans le cadre de « limites raisonnables ». C’est le cas par exemple des Six Nations de Caledonia où les barricades contre le conseil de bande vendu ont été démantelées de force et où les réclamations territoriales ne sont toujours pas satisfaites malgré les engagements et les constatations juridiques favorables.

 

Tant que le droit d’être des peuples autochtones n’est pas reconnu dans la Constitution ou dans quelque autre loi ou consultation, peu importe l’accord que le gouvernement déclare avoir conclu, il n’a pas force de loi. Les droits des peuples autochtones leur appartiennent de droit. Les droits ne se donnent pas, ne s’enlève pas et ne s’abandonnent pas. Peu importe l’entente que les gouvernements parviennent à faire signer à un interlocuteur qui prétend représenter les peuples autochtones, les droits autochtones ne peuvent être abdiqués. Ils doivent être respectés et affirmés sinon ils n’ont aucun statut.

En tant que peuples autochtones, c’est-à-dire en tant qu’habitants originels, les peuples autochtones ont un droit ancestral à la souveraineté. Ils ont une réclamation légitime à la terre de leurs ancêtres et le droit de décider de ce qu’ils veulent en faire. Ce droit n’est pas perdu même s’ils ont été assujettis durant l’époque coloniale et que beaucoup d’entre eux ont été soumis à des traités qui tiennent le monarque britannique comme souverain. Ce droit ne peut être perdu tout juste parce qu’ils n’ont pas eu leur mot à dire à l’époque de la Confédération et depuis. Cette histoire ne fait que mettre en évidence qu’à l’heure actuelle la Constitution du Canada n’enchâsse pas le droit souverain des peuples autochtones de décider de leurs affaires ni leurs autres droits ancestraux.

En tant que peuples souverains, les peuples autochtones ont le droit de déterminer non seulement leurs affaires, mais toutes les affaires du Canada dans son ensemble dans la mesure où cela les affecte. Ils ont droit d’avoir voix au chapitre sur toutes les questions économiques, les affaires culturelles et les questions liées à la guerre et la paix. Qu’ils se reconnaissent citoyens du Canada ou non n’y change rien. Le peuple canadien tel qu’il est constitué aujourd’hui vit sur un territoire appelé Canada et est donc tenu de respecter les droits des peuples autochtones aux terres qui leur reviennent de droit. En outre, tous les territoires dont ils ont besoin pour vivre doivent être clairement délimités de manière à consacrer leurs droits dans la loi, et non en utilisant une certaine conception de la primauté du droit pour éteindre ces droits, voire pour commettre le génocide contre eux.

Si le gouvernement canadien reconnaissait en pratique les droits ancestraux des peuples autochtones, il n’y aurait pas tant de litiges et de causes devant les tribunaux ou tant de jeunes autochtones dans les prisons ; il n’y aurait pas tant de femmes et filles disparues et assassinées ou tant de suicides sur les réserves et dans les centres urbains. Les agences gouvernementales ne seraient pas autorisées à les priver de ce qui leur revient de droit, ce qui inclut l’affirmation de leurs droits en tant qu’êtres humains en matière de soins de santé, d’éducation et de logement.

La reconnaissance des droits ancestraux des peuples autochtones doit avoir préséance. Ce n’est pas une question de paroles mais d’actes. Voilà le fait fondamental auquel le premier ministre ne peut échapper quoi qu’il dise ou fasse.

 

Source: http://cpcml.ca/francais/Lmlq2017/Q47039.HTM